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le HIPEC (CHIP) (OVHIPEC) dans le cancer de l'ovaire

-information pour patientes-

 

Dr. Stefaan Mulier, chirurgie oncologique, Clinique du Parc Léopold, Bruxelles

 

 

Qu'est-ce que le cancer de l'ovaire?

Le cancer de l'ovaire est une tumeur maligne qui provient des cellules à la surface de l'ovaire.

Ce cancer est plutôt rare (12-15 cas par 100 000 femmes par an) mais il est souvent plus agressif que les autres types de cancer des organes génitaux féminins.

Le danger du cancer de l'ovaire vient du fait que les cellules tumorales peuvent lâcher l'ovaire et se répandre (se disséminer, métastaser) dans la cavité abdominale. Ensuite, ces cellules peuvent s'implanter sur le péritoine et se multiplier pour former de nouveaux foyers de cancer (ensemencements, métastases).

Comme le cancer de l'ovaire ne donne guère de plaintes au début, le diagnostique est souvent tardif, quand il y a déjà des métastases péritonéales.

 

Cancer de l'ovaire droit (1) avec métastases péritonéales:

Sur les intestins (2), contre le diaphragme (3) et sur l'épiploon

(4, = tablier de graisse qui dépend de l’estomac et qui couvre les intestins)

 

 

Quelles sont les chances de guérison?

Les chances de guérison dépendent du stade de la maladie au moment du diagnostique.

 

Stade I.

Quand le cancer se limite aux ovaires, les chances de survie à 5 ans sont en moyen de 85%.

 

Stade II.

Quand le cancer s'est répandu dans le petit bassin, les chances de survie à 5 ans sont en moyen de 50%.

 

Stade III.

Quand le cancer s'est répandu dans la cavité abdominale (cancer du péritoine, carcinomatose péritonéale), les chances de survie à 5 ans sont en moyen de 35%, mais ils varient entre 28% (résection des foyers tumoraux très incomplète) et 75% (résection des foyers tumoraux macroscopiquement complète).

 

Stade IV.

Quand le cancer s'est répandu vers d'autres organes comme le foie ou les poumons, les chances de survie à 5 ans sont en moyen de 5%.

 

Tous ces chiffres ne sont que des moyennes. Les chances de survie dépendent encore de tas d'autres facteurs. Un estimation optimale ne peut être réalisée que par le médecin sur base du dossier complet.

 

Chez beaucoup de patientes attentes d'un cancer de l'ovaire avancé, les métastases se limitent longtemps au péritoine. Ce n'est que tardivement qu'apparaissent des métastases aux poumons ou au foie, contrairement à d'autres tumeurs qui peuvent provoquer une carcinomatose péritonéale, comme le cancer du côlon. Voilà pourquoi actuellement beaucoup de chercheurs essaient d'améliorer le traitement régional du cancer de l'ovaire, c'est à dire le traitement des métastases du péritoine, par exemple par un HIPEC (CHIP) (OVHIPEC) (voir plus loin).

 

Quelles sont les conséquences du cancer du péritoine ?

Le cancer du péritoine peut entraîner deux types de problèmes:

 

-la formation d’ascite (remplissage de la cavité de l’abdomen par du liquide).

Toute personne en bonne santé a une petite quantité de liquide dans la cavité péritonéale, qui facilite le glissement des anses du petit intestin. Ce liquide est produit de façon continue, surtout par le péritoine du petit intestin, et est également continuellement réabsorbé, surtout par le péritoine en dessous du diaphragme (muscle respiratoire entre la cavité du thorax et la cavité de l’abdomen) et par le péritoine de l’épiploon (tablier de graisse qui dépend de l’estomac et qui couvre les intestins). Dans le cancer du péritoine, il peut y avoir un déséquilibre entre la production et l’absorption de liquide, par exemple par un blocage de l’absorption par des foyers tumoraux, ce qui entraîne l’apparition d’ascite. La patiente remarque qu’elle gagne rapidement du poids et que le ventre devient ballonné et tendu.

 

-occlusion (passage difficile du contenu intestinal).

Les foyers tumoraux peuvent faire coller les anses intestinales entre elles et à la paroi de l’abdomen. Les accolements diminuent la mobilité de l’intestin et provoquent des coudes et des virages en épingle à cheveux. Les foyers tumoraux à l’extérieur de l’intestin peuvent comprimer la paroi intestinale et compliquer ainsi le passage. Une occlusion peut se manifester par l’apparition de crampes et de vomissements, par l’absence de passage de gaz et de selles, et par le ballonnement de l’abdomen. 

 

En quoi consiste le traitement du cancer de l'ovaire?

 

1. 1. Le traitement classique du cancer de l'ovaire

Le traitement classique du cancer de l'ovaire consiste en une intervention chirurgicale, complétée par de la chimiothérapie intraveineuse.

 

1a. Chirurgie: debulking optimal (macroscopiquement complet)

La résection la plus complète possible (debulking, cytoréduction) de tous les foyers cancéreux est le fondement du traitement du cancer de l'ovaire.

 

L'intervention comprend au moins la résection de l'utérus (matrice) et des ovaires, la résection des ganglions et la résection de l'épiploon (tablier de graisse qui dépend de l’estomac et qui couvre les intestins; cet organe contient souvent des métastases et est enlevé systématiquement par précaution).

 

Au moment du diagnostique d'un cancer de l'ovaire, il y a souvent déjà des métastases péritonéales. La résection de tous ces foyers nécessite souvent une intervention de longue durée. Il est régulièrement nécessaire d'enlever une partie du côlon (gros intestin) ou de l' intestin grêle (petit intestin) ou d'enlever entièrement des organes comme la vésicule ou la rate. Tous les endroits atteints du péritoine sont enlevés. Cela est souvent nécessaire au niveau de la paroi abdominale, la vessie et le diaphragme (muscle de respiration entre le thorax et l'abdomen). A d'autres endroits, les foyers tumoraux sont coagulés (brûlés) par un bistouri (couteau) électrique, comme sur la capsule du foie.

 

Jusqu'il y a quelques années, les médecins se contentaient d'enlever la plus grande partie de la tumeur, en laissant derrière des foyers tumoraux jusque 2 cm. De plus en plus, il est devenu clair que non pas la plus grande partie, mais bien tous les foyer tumoraux doivent être réséqués. La complétude de la résection a une grande influence sur les chances de survie (Chi, Gynecol Oncol 2006):

 

Diamètre du plus grand foyer tumoral résiduel

Survie à 5 ans

Survie à 10 ans

plus que 2 cm

28%

10%

1 à 2 cm

28%

19%

0.5 à 1 cm

41%

23%

moins que 0.5 cm

55%

38%

aucun foyer résiduel

75%

48%

 

Un 'debulking optimal' signifie donc un debulking 'macroscopiquement complet'. Cette intervention vaut mieux être réalisée par des chirurgiens ou des gynécologues avec une formation et une expérience spéciale dans cette chirurgie complexe. Des études récentes montrent malheureusement que beaucoup de femmes atteintes d'un cancer de l'ovaire ne reçoivent toujours pas de traitement chirurgical optimal (Aletti, Mayo Clin Proc 2007).

 

1b. Chimiothérapie intraveineuse

L'intervention chirurgicale pour un cancer de l'ovaire est presque toujours complétée par de la chimiothérapie intraveineuse (chimiothérapie via une perfusion), sauf pour une partie des patientes au stade I qui ont peu de risque de récidive (rechute).

La chimiothérapie standard combine un dérivé de platine (comme le carboplatine) en une taxane (paclitaxel).

Le cancer de l'ovaire est au début en règle général très sensible à la chimiothérapie intraveineuse. Néanmoins, il récidivera (reviendra) chez une grande partie des patientes après un certain temps, surtout quand toute la tumeur n'a pas été enlevée au moment de l'intervention.

 

Debulking primaire ou debulking d'intervalle?

L'ordre de chirurgie et de chimiothérapie dépend de l'extension de la tumeur.

Quand le spécialiste juge, le plus souvent sur base d'une laparoscopie (coelioscopie) exploratrice, que toute la tumeur peut être enlevée en une intervention, un debulking 'primaire' est réalisée, suivi par de la chimiothérapie (typiquement 6 cures).

Quand la tumeur est trop extensive, ou quand il y a une quantité importante d'ascite (liquide abdominal), on donnera d'abord de la chimiothérapie pour faire fondre la tumeur (typiquement 3 cures), ensuite on réalisera un debulking 'd'intervalle', qui est suivi par encore de la chimiothérapie (typiquement 3 cures).

Dans le cancer de l'ovaire extensif, cette stratégie permet d'augmenter la chance de pouvoir enlever complètement tous les foyers tumoraux. Elle permet également de diminuer le risque de complications chirurgicales.

 

2. Le traitement du cancer de l'ovaire par HIPEC (CHIP) (OVHIPEC)

Le traitement du cancer de l'ovaire par HIPEC (CHIP) (OVHIPEC) consiste en le traitement classique (chirurgie complétée par de la chimiothérapie intraveineuse) auquel est ajouté un rinçage de l'abdomen par de la chimiothérapie chauffée.

 

Qu’est-ce qu’un HIPEC (CHIP) (OVHIPEC)?

HIPEC est l'abréviation anglaise de Hyperthermic IntraPEritoneal Chemotherapy, ce qui signifie: rinçage de la cavité péritonéale avec de la chimiothérapie chauffée.

CHIP est l'équivalent francophone de HIPEC et signifie : Chimiothérapie Hyperthermique IntraPéritonéale.

OVHIPEC signifie l'application du HIPEC dans le cancer de l'ovaire.

 

Après avoir enlevé toute tumeur visible, la cavité abdominale est rincée avec de la chimiothérapie chauffée. On met des tuyaux dans la cavité abdominale pour apporter le liquide chauffé vers le ventre, et pour ensuite reconduire ce liquide vers un réservoir externe dans un circuit fermé. Au moment où la température souhaitée est atteinte, la chimiothérapie est ajoutée au liquide. Pour un cancer de l’ovaire, on rince l'abdomen avec du Cisplatine à 40,5° C pendant 90 minutes.

 

 

Pourquoi rincer la cavité abdominale avec de la chimiothérapie chauffée?

Le rinçage de la cavité abdominale avec de la chimiothérapie chauffée a pour but de tuer les foyers tumoraux microscopiques qui sont invisibles à l’œil nu et qui sont restés derrière après la résection de la tumeur. La chimiothérapie versée dans la cavité abdominale, pénètre très peu dans le reste du corps et entraîne beaucoup moins d’effets secondaires que la même quantité de chimiothérapie donnée via une perfusion intraveineuse. De cette manière, on peut administrer des quantités beaucoup plus grandes et exposer ainsi les cellules tumorales à des concentrations qui sont jusqu’à 100 fois plus hautes que via une perfusion.

Si en plus on chauffe cette chimiothérapie, on augmente l’effet destructeur sur les cellules tumorales ainsi que la profondeur de pénétration dans les foyers résiduels.

 

Comment se déroule l’hospitalisation?

Après l’intervention, la patiente reste environs trois jours aux soins intensifs et retourne ensuite à sa chambre à l'étage de chirurgie.

Il faut compter en moyenne deux semaines avant que la patiente puisse se réalimenter normalement, parce que la vidange de l’estomac est fréquemment perturbée pendant quelque temps après un HIPEC (CHIP) (OVHIPEC). Les aliments sont administrés temporairement par un petit tuyau directement dans le petit intestin, qui, lui, reprend plus vite sa fonctionne normale.

La durée de l'hospitalisation se situe entre 2 et 4 semaines. La durée dépend surtout du moment de la reprise de la fonction de l'estomac.

 

Quels sont les effets secondaires?

Un HIPEC (CHIP) (OVHIPEC) est une intervention assez lourde qui demande beaucoup d’énergie au corps et à l’esprit. Beaucoup de patientes se sentent assez fatigués pendant trois mois. L’appétit peut être faible pendant quelque temps et il peut y avoir des épisodes de moral bas. Une bonne motivation préalable, une information correcte, et un bon soutien par la famille, le chirurgien, le généraliste, la diététicienne et le kinésithérapeute sont de grande importance. Après trois mois, la qualité de vie est au même niveau qu’avant l’opération.

 

Quelles sont les complications possibles?

Après un HIPEC (CHIP) (OVHIPEC) il peut y avoir des complications dans environs 30% des interventions.

Comme après chaque intervention chirurgicale, des complications comme une infection ou un saignement peuvent arriver.

Quelques complications sont plus spécifiques pour un HIPEC (CHIP) (OVHIPEC), notamment:

-un risque plus élevé de lâchage des sutures chirurgicales entre les intestins à cause de la chimiothérapie chauffée. En cas de risque élevé, le médecin peut juger qu’il est plus sécurisant de créer une stomie (sortir une partie de l’intestin à travers la paroi abdominal) temporairement.

-un épanchement de liquide dans la cavité thoracique (l’espace entre les poumons et la cage thoracique), surtout en cas de résection de tumeur sur le diaphragme. Dans ces cas, le chirurgien placera de façon préventive des tuyaux dans la cavité thoracique afin d’aspirer du liquide éventuel pendant quelques jours.

-une évacuation retardée de l’estomac pendant environs deux semaines.

Des complications de la chimiothérapie même sont plutôt rares.

 

En quoi consiste le traitement après le HIPEC (CHIP) (OVHIPEC)?

Pendant l’hospitalisation et après le retour à domicile, la patiente reçoit pendant quelques semaines de la kinésithérapie qui a un effet favorable sur la revalidation générale après cette intervention lourde.

La patiente est revue régulièrement à la consultation par le chirurgien qui suivra la convalescence, qui adaptera progressivement le régime, qui fournira au mieux possible des réponses aux nombreuses questions, et qui soutiendra psychologiquement la patiente.

Dès que la patiente a récupéré suffisamment sur le plan physique et psychologique, une chimiothérapie intraveineuse complémentaire est donnée pendant 6 mois (3 mois en cas où la patiente a déjà reçu de la chimiothérapie avant l'intervention).

Des examens de contrôle réguliers (prise de sang, scanner) sont programmés.

 

Est-ce qu’un HIPEC (CHIP) (OVHIPEC) est meilleur qu'un traitement classique pour un cancer de l'ovaire?

Il n'existe pas encore de réponse certaine à cette question. D'ici quelques années, deux études internationales permettront de donner une réponse avec plus de certitude.

L'étude OVHIPEC-1 du Nederlands Kanker Instituut d'Amsterdam évalue le bénéfice éventuel d'ajouter un HIPEC (CHIP) (OVHIPEC) à un debulking d'intervalle (donc après chimiothérapie intraveineuse préopératoire).

L'étude HIPEC-ROV de l'Université de New South Wales à Sydney évalue le bénéfice éventuel d'ajouter un HIPEC (CHIP) (OVHIPEC) à un nouveau debulking en cas de récidive (rechute) d'un cancer de l'ovaire.

 

Néanmoins, il existe actuellement trois types d'indices q'un HIPEC (CHIP) (OVHIPEC) pourrait être meilleur qu'un traitement classique pour un cancer de l'ovaire.

 

1. Un HIPEC (CHIP) est bénéfique pour une carcinomatose péritonéale suite à un cancer du côlon (cancer du gros intestin).

Une étude randomisée (lisez: de haute qualité scientifique) du Nederlands Kanker Instituut d'Amsterdam, chez des patients présentant une tumeur du côlon avec un cancer du péritoine, a démontré que les patients qui avaient subi un HIPEC (CHIP) avaient un meilleure survie que les patients sous traitement classique. La survie à 5 ans était 45% après HIPEC (CHIP) en cas de résection complète de tous les foyers, par rapport à 9% après traitement classique (Verwaal, Ann Surg Oncol 2008).

 

2. Une chimiothérapie intrapéritonéale non chauffée est bénéfique dans le cancer de l'ovaire.

Trois études randomisées (lisez: de haute qualité scientifique) chez des patientes présentant un cancer de l'ovaire ont démontré que la survie à 5 ans s'améliorait de 10 % en rinçant l'abdomen avec une chimiothérapie pendant quelques jours ou quelques semaines après un debulking.

Le rinçage de l'abdomen ne se faisait donc pas pendant mais après l’opération par des tuyaux qui avaient été mis en place pendant l’opération. La chimiothérapie n’était pas chauffée non plus. Actuellement on sait qu'une chimiothérapie qui est donnée de cette façon n'atteint pas la totalité du péritoine à cause des adhérences postopératoires.

Malgré cette réalisation du rinçage qui en théorie était suboptimale, il y avait quand même un effet bénéfique net sur la survie (Alberts, NEJM 1996;  Markman, J Clin Oncol 2001; Armstrong, NEJM 2006).

 

3. Un HIPEC (CHIP) (OVHIPEC) est bénéfique dans le cancer de l'ovaire (étude rétrospective).

Une autre étude ' rétrospective' (lisez: moins convaincante sur le plan scientifique) a comparé un ‘vrai’ HIPEC (CHIP) (OVHIPEC) avec le traitement classique. La survie à 5 ans était 30% plus haute après HIPEC (CHIP) (OVHIPEC) qu'après traitement classique (Ryu, Gynecol Oncol 2004). Des études rétrospectives doivent néanmoins toujours être interprétées avec un certaine réserve.

 

En conclusion, il y a des indices qui donnent de l’espoir, mais il n’existe pas encore de preuve définitive par une étude scientifique optimale (randomisée) qu’un HIPEC (CHIP) (OVHIPEC) soit utile dans le cancer du péritoine par un cancer de l’ovaire.

 

Considération finale

Toute l’information de cette page a pour but de donner une information de base aux patientes atteints d’un cancer de l'ovaire. De cette manière, la patiente peut préparer les questions qu’elle veut poser au chirurgien, ou relire ce texte à son aise après la consultation. Néanmoins, la maladie de chaque patiente est unique et le traitement chirurgical et médical du cancer de l'ovaire évoluent rapidement. C’est la raison pour laquelle les explications que votre médecin vous donne ou les traitements qu’il vous propose peuvent être légèrement différents de cette information d’introduction. Ne vous laissez pas induire en erreur. Les explications de votre médecin priment toujours sur les explications contenues dans ce document. 

 

 

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